Émissaires des morts de Adam-Troy Castro – seconde partie : le roman

La première parution de l’année chez Albin Michel Imaginaire est un gros pavé contenant 4 longues nouvelles et un roman, Émissaires des morts de l’auteur américain Adam-Troy Castro. Les 4 textes se déroulent avant le roman ont été chroniqués ici. L’éditeur a choisi de proposer les nouvelles et le roman pour mieux apprécier l’évolution du personnage principal, Andrea Cort. Si vous voulez vous faire une idée de ce personnage et de l’univers, Albin Michel Imaginaire met d’ailleurs en ligne gratuitement en numérique le premier texte Avec du sang sur les mains.

Le roman se déroule dans un univers de space-opera où l’humanité a conquis d’autres mondes. D’autres espèces intelligentes ont été découvertes sur plusieurs planètes, on en croise beaucoup dans les 4 textes et beaucoup moins dans le roman. Le prologue du roman revient sur le passé d’Andrea Cort, héroïne de ce cycle, et procureure générale des Corps diplomatiques. Andrea a été marquée à vie par un événement très traumatisant de son enfance sur Bocaï. A l’age de seulement 8 ans, Andrea a échappé au massacre de Bocaï où des humains et une autre espèce se sont entretués alors qu’ils vivaient en très bonne entente depuis des années. Des pulsions meurtrières et une folie temporaire se sont emparées de tous, adultes comme enfants. Plutôt que de condamner Andrea à la prison à vie, les Corps diplomatiques ont choisi d’utiliser ses capacités en leur faveur et l’ont engagé dans un contrat à vie où elle intervient lors de crimes où des espèces sentientes sont en cause.

Au tout début du roman, Andrea est envoyée sur demande sur un monde artificiel construit par les IAs-Sources, Un Un Un. Les IAs-Sources, dont on fait réellement connaissance dans le roman, sont une forme de vie sentiente particulière constituée d’intelligences artificielles très puissantes et omniprésentes. Elles sont très craintes à cause de leur puissance et de leur ancienneté. Un Un Un est un monde très particulier également. Il a une forme cylindrique, est gigantesque, et il n’y a pas vraiment de sol. De gigantesques arbres noueux et très résistants recouvrent le fond du monde et un océan toxique se trouve tout en bas. On peut y croiser des dragons et des Brachiens, espèce sentiente créée par les IAs-Sources grâce à la biotechnologie, ce qui est normalement interdit, mais les IAs-Sources sont un peu intouchables. On peut également rencontrer sur cette planète des humains, vivant principalement à Hamac ville et autorisés à étudier les Brachiens. Hamac ville est construite par un assemblage de cordes et de hamacs, autant dire qu’il ne faut pas avoir le vertige pour se déplacer sur ce monde. Les descriptions de ce monde sont à couper le souffle et vraiment fascinantes. Elles provoquent le vertige même chez ceux qui ne souffrent pas de peur du vide. Certains passages sont vraiment intenses et terrifiants pour qui n’a pas le pied très sur.

Andrea est envoyée sur Un Un Un pour résoudre un meurtre, celui de Christina Santiago, tombée dans le vide. Tout accuse les IAs-Sources mais Andrea doit faire la lumière sur cette mort en innocentant ces dernières. C’est une affaire sensible sur le plan diplomatique, surtout qu’un deuxième crime a lieu peu avant l’arrivée d’Andrea sur Un Un Un. L’enquête s’annonce difficile, d’autant plus que le monde est dangereux, de part sa structure et la présence omniprésente des IAs-Sources qui semblent savoir beaucoup de choses sur le passé d’Andrea. Le roman se situe après la dernière nouvelles, Démons Invisibles, à laquelle il est fait référence quelques fois. Elle apparait toujours marquée par son passé et déterminée à comprendre ce qui s’est réellement produit sur Bocaï. C’est un personnage fascinant à suivre, sa psychologie est très développée, une anti héroïne froide et très intelligente. Elle devient la narratrice dans le roman écrit à la première personne et ainsi au plus près de ses pensées.

L’intrigue policière en elle même est intéressante à suivre mais pas vraiment révolutionnaire. Les points forts du roman sont le fait qu’il est très prenant et immersif. Le monde où il se déroule est fascinant et apporte beaucoup au récit. Autre élément très prenant: l’évolution du personnage d’Andrea, et le fait que l’on en apprenne plus sur Bocaï. Tout cela laisse présager beaucoup de bonnes choses pour la suite, deux autres tomes étant prévus par la suite, on apprend assez peu de choses pour donner envie de lire la suite mais assez pour susciter la curiosité. Les personnages secondaires sont bien campés, surtout le duo Oscin / Skye, personnage fascinant formé à partir de 2 personnes différentes qui n’en font plus qu’une.

Émissaires des morts est un roman fascinant que j’ai pris beaucoup de plaisir à lire. Le monde cylindre sur lequel il se déroule est véritablement vertigineux et ensorcelant. Les possibilités apportées dans l’univers dans lequel vit Andrea sont passionnantes et donnent envie de lire la suite. Le côté policier est sympathique mais l’intérêt du récit vient de ces thématiques et des IAs-Sources. Adam-Troy Castro nous offre une histoire captivante et intelligemment construite avec un personnage qu’on aime suivre.

Autres avis: Just a word, Outrelivres, Apophis, l’ombre, L’épaule d’Orion, Yuyine , Albedo , Les lectures du Maki , Le chien critique , Un papillon dans la lune ,

Auteur : Adam-Troy Castro

Traducteur: Benoît Domis

Édition: Albin Michel Imaginaire

Parution : 6 janvier 2021

Un space opera coup-de-poing situé dans un futur lointain, celui du Système Mercantile, où le racisme, la guerre, l’esclavagisme et la corruption n’ont pas pris fin, bien au contraire.

Quand elle avait huit ans, Andrea Cort a été témoin d’un génocide. Pis, après avoir vu ses parents massacrés, elle a rendu coup pour coup. En punition de ses crimes, elle est devenue la propriété perpétuelle du Corps diplomatique. Où, les années passant, elle a embrassé la carrière d’avocate, puis d’enquêtrice pour le bureau du procureur. Envoyée dans un habitat artificiel aussi inhospitalier qu’isolé, où deux meurtres viennent d’être commis, la jeune femme doit résoudre l’affaire sans créer d’incident diplomatique avec les intelligences artificielles propriétaires des lieux. Pour ses supérieurs, peu importe quel coupable sera désigné. Mais les leçons qu’Andrea a apprises enfant ont forgé l’adulte qu’elle est devenue : une femme pour le moins inflexible, qui ne vit que pour une chose, « combattre les monstres ».

18 commentaires

  1. C’est vrai qu’il est tout bon ce livre et que même si l’enquête (bien construite tout de même) ne fait pas dans l’originalité, l’univers, le personnage et les messages de l’oeuvre en font une super lecture! J’ai tellement hâte de lire la suite!

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