La main gauche de la nuit de Ursula K. Le Guin

Les éditions Robert Laffont dans la collection Ailleurs et Demain ont décidé d’offrir une version collector à un des romans les plus connus d’Ursula Le Guin, La Main gauche de la nuit. Pour cela, ils ont opté pour une révision de la traduction par Sébastien Guillot, et on ajouté une préface de Catherine Dufour et une postface de Stéphanie Nicot. L’objet livre est très réussi avec une couverture cartonnée aux jolis reflets et un signet intégré. Le roman a obtenu le prix Nebula du meilleur roman en 1969 et le prix Hugo dans la même catégorie en 1970. Il fait partie du cycle de l’Ekumen, qui comporte six autres romans qui peuvent être lus indépendamment et ne se suivent pas. En 1969 fut publiée une nouvelle, Le Roi de Nivôse se situant sur la même planète.

Un planet opera

Dans un futur lointain, de nouvelles planètes ont été découvertes, toutes avec leurs particularités. L’Ekumen est une organisation regroupant de nombreuses planètes et qui a pour objectif de développer les échanges entre les différents mondes qui la composent. Dans le but d’agrandir pacifiquement sa sphère d’influence, l’Ekumen tente de rallier d’autres planètes en envoyant des ambassadeurs sur des mondes isolés. C’est le cas avec la planète Nivôse, appelée Gethen par ses habitants, où se rend Genly Aï, un Terrien qui va avoir la dure tache de les convaincre. Mais Gethen a plusieurs spécificités. Tout d’abord, il y fait très froid et les conditions climatiques sont très difficiles. Ensuite, la situation politique est assez tendue, les gouvernements ne semblant pas très favorables à une adhésion à l’Ekumen. Genly a beaucoup d’éléments à assimiler sur cette planète où le décompte du temps est différent et la conception des choses n’est pas du tout la même. Surtout, il va lui falloir apprendre à connaitre ses habitants qui ont une grande particularité.

Une évolution génétique importante a fait que les habitants de cette planète ne sont ni homme ni femme, ils sont hermaphrodites. En fait, la majorité du temps, ils sont asexués. Cette période s’appelle le soma. Puis vient le kemma qui correspond à une poussée hormonale une fois par mois qui leur fait prendre de manière aléatoire l’un ou l’autre sexe. Cette spécificité a des conséquences sur la vie des gens et sur la société que Genly a du mal à assimiler. Il en est de même pour les habitants de Gethen qui le perçoivent comme un monstre et vont être plutôt froids avec lui. Ursula Le Guin décrit avec précision la société de Gethen, leur manière de vivre si particulière et comment le fait qu’ils peuvent être à la fois père et mère d’enfants influencent leur façon de voir les choses.

Des thématiques actuelles mais un roman qui a un peu vieilli

L’intrigue générale s’articule autour de la mission de Genly Aï et des problèmes qu’il va rencontrer avec la nation appelée Karhaïde. Le roi de cette région va changer de premier ministre en remplaçant Estraven par un nouveau. Estraven se retrouve banni et Genly Aï sera à son tour exilé. Les deux personnages vont vivre une épopée éprouvante dans une planète hostile. Le récit est raconté par ces deux narrateurs et cela surprend au départ car tout deux parlent à la première personne du singulier, et j’ai eu du mal à les différencier. On s’y fait toutefois en comprenant que Estraven tient un journal de bord pour narrer l’histoire. La narration en journal de bord a tendance à donner un aspect froid au personnage qui s’ajoute au rude climat de la planète. Le début du roman donne un peu l’impression d’une étude sociologique du peuple de Gethen. Le rythme est assez lent, ce qui heureusement s’améliore par la suite surtout dans la seconde partie où l’autrice développe la relation qui se noue entre les deux narrateurs de très belle manière. J’ai trouvé ce lien entre eux très émouvant et magnifiquement décrit tout comme l’évolution de la vision de Genly Aï au fur et à mesure des événements.

Les thématiques soulevées par l’autrice sont novatrices surtout pour l’époque, le roman ayant 50 ans. Elle nous interroge sur la sexualité et son rôle dans les difficultés de communication et sur tout ce qu’elle entraine dans la société. Ces questions sont toujours d’actualité et d’autant plus marquantes. Malgré ses quelques longueurs et aspects dans la narration soulevés plus haut, le roman mérite d’être lus pour ces questionnements et l’aspect fondateur qu’il a eu sur pas mal d’autrices et auteurs après Ursula Le Guin. Certainement que ce roman aurait été plus marquant pour moi si je l’avais lu il y a longtemps, sans avoir lu tout le courant entrainé par les livres de Ursula Le Guin.

La Main gauche de la nuit est ainsi un roman qui mérite d’être découvert pour de nombreuses raisons, principalement ses questionnements sur le genre qui restent toujours très importantes de nos jours. D’autant plus que cette édition lui offre un magnifique écrin.

Autres avis: L’imaginarium électrique, Vert, Xapur, Lorhkan, le syndrome quickson, ma lecturothèque, Tachan, le révelecteur, Yogo,

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Autrice: Ursula K. Le Guin

Édition: Robert Laffont collection Ailleurs et Demain

Parution: 07/10/2021

Sur Gethen, planète glacée, il n’y a ni hommes ni femmes, seulement des êtres humains. Des hermaphrodites qui, dans certaines circonstances, adoptent les caractères de l’un ou l’autre sexe.
Genly Aï, un ambassadeur venu de la Terre, est chargé de rallier Gethen aux autres planètes déjà réunies sous les couleurs de l’Ekumen. Mais mille obstacles se dressent devant lui. La tâche sera rude. Parviendra-t-il à mener à bien sa mission ?

13 commentaires

  1. Comme toi, content de l’avoir lu mais probablement lu « trop tard » ! Pour un livre de 50 ans, il est très en avance sur son temps.

    Je trouve que la préface et la postface apporte un plus à ceux qui comme moi ne connaissent pas bien Ursula K. Le Guin.

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