Les carnets Lovecraft Le Molosse illustré par Armel Gaulme

Depuis que l’intégralité de l’œuvre de Lovecraft est tombée dans le domaine public, on assiste à la multiplication des parutions, traductions, ou productions liées à l’auteur de Providence. A défaut d’une vraie adaptation cinématographique, de nombreuses adaptations graphiques voient le jour. Ainsi, après celles de François Baranger (fort réussies d’ailleurs), Bragelonne a décidé d’éditer des nouvelles de Lovecraft sous forme de carnet illustré par Armel Gaulme. Le premier des carnet publié a été consacré à Dagon en août 2019, c’est maintenant Le Molosse qui a l’honneur d’être illustré et publié avec une belle couverture cartonnée dans les tonalités bleutées. Les dessins de ces carnets sont tous des crayonnés, donnant ainsi l’impression de carnet de croquis. La traduction est signée Arnaud Demaegd, c’est le même texte que celui présenté dans le livre Cthulhu : le mythe tome 2 de 2015.

Parmi le corpus des textes de Lovecraft, Le Molosse est une nouvelle particulière. Elle a été écrite en 1922 et a été publiée en février 1924 dans le magazine Weird Tales. A ma connaissance, la nouvelle n’avait pas été illustrée ou adaptée auparavant. La plupart des textes de Lovecraft se déroulent dans la région autour de la ville de Providence où vécut l’auteur. Le Molosse se distingue à sa manière puisque l’histoire se situe en Europe et plus particulièrement en Hollande, des pays ou Lovecraft n’était jamais allé. Elle est pourtant reliée à la mythologie lovecraftienne par la présence du Necronomicon et la mention de Abdul al-Hazred. C’est en fait la première fois que Lovecraft mentionne le célèbre ouvrage qui sera plusieurs fois repris par la suite.

Les personnages ne ressemblent pas à ceux que l’on retrouve habituellement chez Lovecraft, ce ne sont pas des érudits, des personnes qui tombent par hasard sur un élément mystérieux. En effet, l’histoire met en scène deux hommes passionnés d’occultisme possédant une collection d’objets macabres réunis dans leur musée privé. Pour agrandir cette collection, ils n’hésitent pas à avoir recourt au pillage de tombes. C’est ainsi qu’ils se rendent en Hollande pour ouvrir la sépulture d’un sorcier et y déterrer une étrange amulette en forme de chien. Les deux hommes pensent à un passage du Necronomicon qui la mentionne, mais ils la prennent tout de même. Cela va entrainer le réveil d’une créature terrifiante et mystérieuse, qui va les traquer dans la brume jusque dans leur demeure… On retrouve bien l’aspect inéluctable de nombreux textes de Lovecraft, et le côté indicible de l’adversité des deux hommes.

Les illustrations mettent en évidence l’aspect assez macabre du texte. On trouve par exemple des stèles renversées, des tombes, des morceaux de corps en décomposition. Mais on sent que Armel Gaulme s’est fait plaisir avec le fameux musée occulte des deux personnages. Ce musée a offert à l’illustrateur un grand nombre de possibilités créatives. Ces dessins font ressortir la noirceur du texte tout en le complétant. C’est une valeur ajoutée non négligeable au texte, et on imagine bien le potentiel qu’une telle technique pourrait avoir sur d’autres textes à venir. Le dessin est ici plus intéressant que dans Dagon que j’avais déjà lu, où le récit laissait peu de place à l’imagination et du coup le dessin était moins percutant.

Avec ce titre, Bragelonne étoffe un renouveau de l’image que l’on peut se faire des récits de Lovecraft, dans une nouvelle moins connues de l’auteur. Le texte, atypique dans la production lovecraftienne, fait incontestablement penser à Edgar Poe, l’auteur mentionne d’ailleurs Charles Baudelaire qui fut traducteur de Poe en France. Les illustrations en noir et blanc renforcent l’esthétisme gothique du texte. Entre cette collection, celles avec les planches de François Baranger, et les mangas de Gou Tanabe, les lecteurs ont à l’heure actuelle de nombreux moyens de se replonger dans les écrits du maître de Providence. Ces adaptations sont complémentaires, à l’heure actuelle je trouve que toutes ont leur place, mais le Molosse est pour l’instant la plus intéressante de cette collection des Carnets Lovecraft.

Autres avis:

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En papier

Auteur: Howard Phillips Lovecraft

Illustrateur: Armel Gaulme

Éditeur : Bragelonne collection Les Carnets Lovecraft

Parution: 24/03/2021

Pour contrer l’ennui et enrichir leur musée macabre, deux amis en quête d’émotions fortes s’improvisent pilleurs de sépultures. Leurs expéditions morbides les mènent dans un cimetière de Hollande, où ils entreprennent d’exhumer un cadavre au passé sulfureux. Ils y dénichent une amulette sculptée dans du jade vert, à la forme animale inidentifiable et aux inscriptions renvoyant au Necronomicon. Le temps de leur entreprise, ils sont accompagnés par les aboiements lointains d’un cerbère. Ce molosse n’aura de cesse, dès lors, de les poursuivre.

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