Ada ou la beauté des nombres de Catherine Dufour

Ada Lovelace, peu de personnes connaissent ce nom actuellement alors que celui de son père Lord Byron est célèbre et reconnu. Byron, poète, homme entre deux siècles, aux mœurs dissolues, amis de Percy Bysshe Shelley et celui qui suggéra à ses amis lors d’une soirée à la villa Diodati d’écrire une histoire de terreur d’où résultèrent Frankenstein de Mary Shelley et Le Vampire écrit par John William Polidori. Et pourtant, sans Ada Lovelace, notre société serait bien différente, tellement de choses n’auraient pas été les mêmes. Qui était vraiment Ada Lovelace? Dans quelle société a t’elle évolué? Quel fut son impact sur notre monde? Autant de questions qui se posent et auxquelles répond Catherine Dufour dans cette biographie, la première consacrée à Ada Lovelace en français.

J’avais entendu parler d’Ada Lovelace par la nouvelle de Jean-Laurent Del Socorro, La Machine Différente (dans l’anthologie Créatures des Imaginales) qui parle de la création d’une machine un peu spéciale et définissait Ada comme une pionnière de l’informatique. Pourtant, Ada Lovelace est née en 1815, période peu propice pour les femmes, même celles issues de noble lignées. La vie d’Ada nous est d’abord présentée par le contexte familial avec l’histoire de ses parents et de leur rencontre, tout en tissant le portrait de la société de l’époque sur le plan culturel, économique et sociétal. On est très rapidement plongé dans cette époque si différente de la notre par la description précise de ses mœurs, et par les portraits terriblement vivants des personnes décrites. Cette description de la société de l’époque victorienne est tout simplement fascinante à lire, on apprend beaucoup d’éléments sur la vie des riches, des moins riches, des femmes. Le livre permet d’en savoir plus sur Ada Lovelace mais marque les esprits pour sa peinture de cette époque. J’ai vraiment adoré découvrir cette époque sous la plume de Catherine Dufour, dont la plume dresse des portraits sans concession de l’époque et de ceux qui entouraient Ada. Une époque où être femme était synonyme de répression, d’incompréhension la plus totale (d’elle et de leur utérus), de potiche tout juste bonne à faire des enfants mais sans leur montrer la moindre affection, et de transmettre la dote et la tutelle d’elle même à leur mari. Tout un programme, heureusement le laudanum était là pour calmer tout ce bas monde.

En effet, la vie d’Ada ne fut pas simple, elle ne vécut pas dans un cocon de douceur et de tendresse. Elle ne connut pas son père qui abandonna le foyer familial dès qu’il le put sans oublier la rente que lui prodiguât son mariage avec la mère d’Ada. Celle-ci, frustrée par son mariage ratée, son intelligence gâchée par l’époque, se révélât une mère abusive voulant régenter la vie de sa fille. Ada grandit en se découvrant un amour pour les sciences et les mathématiques, disciplines inconcevables pour une femme qui devait s’intéresser à la littérature, la broderie, et savoir tenir son foyer. Pourtant, par des astuces, Ada arrive à ses fins mais doit comme toute jeune fille digne de ce nom trouver un mari. Elle se retrouve ainsi mariée et avec 3 enfants à l’âge de 25 ans. Sa santé est fragile, son mari ne la comprend pas et n’hésite pas à lui montrer avec des coups si nécessaire. Heureusement pour elle, plusieurs personnes auront un fort impact sur sa vie: tout d’abord la mathématicienne Sommerville puis sa correspondance avec Charles Babbage, sorte d’inventeur fou et concepteur de machines. Grace à lui, Ada apprend, se réalise et participe activement à l’évolution du projet de Charles Babbage. D’une intelligence exceptionnelle, Ada dépasse le maître, écrit un article (la fameuse note G) qui sera révolutionnaire. Pourtant, cela est loin de lui avoir rendu la vie plus facile, au contraire. Ada se réfugia dans le jeu, la drogue et autre palliatif destinés à lui faire oublier l’horreur de sa vie.

Sans cette note G et Ada, pas de programme informatique, et tout ce qui en découla. Alan Turing lui rendra hommage bien des années plus tard. Elle qui mourut à seulement 36 ans, sans savoir la portée de ce qu’elle avait écrit et découvert. Triste destinée pour une triste époque, que Catherine Dufour arrive à rendre si vivante avec sa gouaille sans pareille, sa facilité à raconter des histoires vraies… ou non.

Ada ou la beauté des nombres se révèle un livre passionnant à lire, peignant la vie des femmes au XIX ème siècle et mettant à l’honneur une femme exceptionnelle de manière réaliste. Une véritable réussite, que ce soit pour en apprendre plus sur la vie d’Ada Lovelace, que pour découvrir comment on vivait à cette époque. Un livre à découvrir, un indispensable.

Autres avis: Elhyandra,  LuneTigger LilyLhisbei, Maki., Nebal, Yuyine,

Autrice: Catherine Dufour

Édition : Fayard

Parution: 04/09/2019

Ada Lovelace, fille du poète Lord Byron, est une lady anglaise perdue dans les brumes du xixe siècle. Nous voilà cent ans avant le premier ordinateur, et personne ne se doute que cette jeune femme maladive, emprisonnée dans un corset, étouffant entre un mari maltraitant et une mère abusive, s’apprête à écrire le premier programme informatique au monde.
À 25 ans, déjà mère de trois enfants, Ada Lovelace se prend de passion pour les mathématiques. Elle rencontre Charles Babbage, qui vient de concevoir une machine à calculer révolutionnaire pour l’époque. C’est en la voyant qu’Ada a soudain l’intuition de ce qui deviendra l’informatique.
Sans elle, pas d’Internet, pas de réseaux sociaux, pas de conquête de l’espace.

26 commentaires

  1. Lovelace est une femme qui chatouille plus que l’imaginaire dans notre sphre SFFF, j’ai juste quelques notions de base, et je signe tout de suite pour découvrir sa vie, surtout avec la plume de C. Dufour!!
    Merci mon Troll pour cette découverte

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