La servante écarlate-Margaret Atwood

servante

Après avoir vu l’excellente première saison de la série chroniquée ici, j’ai eu envie de lire le livre. Les deux sont très proches et l’adaptation du livre est vraiment bien réussie, peut être plus difficilement soutenable, la série allant un peu plus loin que le roman paru pour la première fois en 1985.

L’ouvrage de Margaret Atwood appartient au genre de la dystopie, l’auteure dépeint une société imaginaire nommée Gilead qui est organisée dans l’intérêt commun mais qui entrave le bonheur de ses membres. La dystopie est classée dans la science-fiction dans la mesure où elle parle d’anticipation, d’histoire. Le traitement de la science et de la technologie est différent dans la dystopie qui essaye de coller à notre univers. Il est amusant de voir que souvent en médiathèque ou en librairie, on trouve le livre en rayon littérature « blanche » et pas dans les rayons science-fiction.

Autre remarque avant d’entrer dans le vif du sujet, je trouve la phrase du bandeau « Le livre qui fait trembler l’Amérique de Trump » complétement hors de propos. Je ne pense pas que le roman ait un impact quelconque sur Trump, sa politique, son gouvernement. En plus, il induit en erreur sur le contenu du roman. On est dans une phrase d’accroche typique du marketing actuel mais que je trouve franchement mauvaise et totalement hors contexte, le roman ayant été écrit en 1985.

L’époque où se situe le roman n’est pas vraiment précisée mais on peut déduire que c’est un futur proche au moment où le roman a été écrit. Suite à un coup d’état, un gouvernement totalitaire a vu le jour aux États-Unis, la république de Gilead. La religion est au centre de cette république qui a édicté de nouvelles lois où les femmes n’ont plus aucun statut social. La baisse très importante de la fécondité est à l’origine de ce changement qui a pour but de restaurer un niveau de fécondité suffisant et des femmes au foyer pour s’occuper des enfants. Les femmes sont divisées en trois classes bien distinctes: les Épouses, habillées en bleu et qui gèrent la Maison de la famille, les Marthas, habillées en marron qui entretiennent la maison et s’occupent de la cuisine, du ménage,  et enfin les Servantes écarlates habillées en rouge dont le rôle est la reproduction et qui sont les seules femmes fertiles de la société. Les autres femmes qui ne servent à rien pour la société sont déportées dans les Colonies dans le but d’y travailler  pour manipuler des déchets toxiques.

Le sort des hommes n’est pas forcément plus enviable, seuls les hommes riches, les Commandants, ont le pouvoir et les droits qui vont avec.  Ce sont les dirigeants du pays, ils contrôlent des forces militaires et font les lois. Les autres sont relégués à servir les riches, ou à être gardiens ou à un sort pire selon leurs aptitudes. Les religions autres que celle au pouvoir sont interdites et ceux qui refusent de se convertir peuvent finir pendus sur le mur, tout comme les homosexuels hommes ou femmes. Le seul but du régime est de rétablir un taux de natalité conséquent, mais seulement pour les hommes de pouvoir. Bien sur, une société comme celle-là se moque du bonheur de ses citoyens et ne peut obtenir ce qu’elle veut qu’en utilisant la force, ce qui entraine des rebellions.

Margaret Atwood dépeint cette société par les yeux de Defred, une Servante écarlate. Son passé et sa vie d’avant la république de Gilead sont racontés par petites touches au fur et à mesure de ses souvenirs qui l’aident à tenir le coup dans sa nouvelle vie auprès d’une famille dirigeante. On ne connait pas le véritable nom de Defred, on sait qu’elle avait un mari Luke et une petite fille, mais on ne sait pas ce qui leur est arrivé. Toute l’histoire est uniquement racontée à travers son parcours, de la prise de pouvoir de la république de Gilead par les souvenirs de la servante à sa situation au sein de la famille. On a ainsi une véritable impression de prison, tous ses faits et gestes sont régis par des règles bien précises, elle n’a aucune liberté, aucun autre choix que celui d’obéir et de faire des enfants aux commandants où elle sera affectée. Le fait de raconter toute l’histoire de l’unique point de vue de Defred la rend encore plus attachante, humaine et renforce l’identification. Contrairement à la série, on ne sait rien des autres personnages. La femme du commandant apparait beaucoup plus impitoyable dans le roman où les fonctions des personnages semblent totalement les diriger, où seule les servantes semblent avoir de réels sentiments.

La république de Gilead a profité d’une situation dramatique avec la baisse de la fécondité et le fait que les naissances d’enfant viable sont une rareté pour prendre le pouvoir. Des lois concernant les femmes ont d’abord été instaurées puis d’autres lois ont suivi dans le but d’enlever les libertés existantes et de plus en plus de totalitarisme. La violence est devenue monnaie courante afin d’imposer les lois à tous. Au travers du quotidien de Defred et de ses souvenirs, on s’aperçoit très bien de l’horreur de la situation et de comment tout peut très vite basculer.

La servante écarlate est un roman admirable qui a donné lieu à une excellente première saison d’une série qui va devoir s’affranchir du roman par la suite. Le point de vue adopté dans les deux est différent, le roman se focalise uniquement sur le destin de Defred, une servante écarlate, ce qui permet de montrer l’enfermement dont elle est l’objet et toute l’horreur de sa situation.

Autres avis : Boudicca, Aelinel, Lorhkan

mdeAuteur : Margaret Atwood

Édition: Robert Laffont

Parution :08/06/2017

Devant la chute drastique de la fécondité, la république de Gilead, récemment fondée par des fanatiques religieux, a réduit au rang d’esclaves sexuelles les quelques femmes encore fertiles. Vêtue de rouge, Defred, « servante écarlate » parmi d’autres, à qui l’on a ôté jusqu’à son nom, met donc son corps au service de son Commandant et de son épouse. Le soir, en regagnant sa chambre à l’austérité monacale, elle songe au temps où les femmes avaient le droit de lire, de travailler… En rejoignant un réseau secret, elle va tout tenter pour recouvrer sa liberté.

Cette chronique fait partie du : Le challenge abc litterature de l’imaginaire 2018

38 commentaires

  1. Ni vu la série, ni lu le livre. J’en entends tellement parler ces derniers temps que je me demande si je ne vais pas m’intéresser de plus près à cette oeuvre. Tu conseillerais de lire le livre avant ou après la série ? Mais j’avoue que la phrase marketing est presque triste (suite à ton explication), voir pathétique.
    Mais de ce que tu décris, cela me rappelle la série Into the Badlands (avec des différences bien entendu mais l’idée est assez proche), je ne sais pas si tu as eu l’occasion de regarder, je conseille vivement cette série.
    Merci pour ta chronique qui me fait dire un peu plus que je dois me tourner vers ce livre.

    Aimé par 1 personne

    • J’aurai tendance à dire lire le livre avant de voir la série. Même si j’ai fait l’inverse.
      La série est très proche du roman mais elle prend le parti de montrer d’autres personnages en focus et de donner des réponses à des questions qui n’en ont pas dans le roman.
      Les deux sont vraiment très bien en tout cas.
      Je ne connais pas la série Into the Badlands par contre.

      Aimé par 1 personne

  2. Je déteste les pubs qu’ils mettent sur les livres ! je trouve que c’est souvent complètement à côté de la plaque et parfois préjudiciable au livre.
    J’ai adoré la série, mais je l’ai déjà trouvée difficile alors je ne sais pas si je lirai le livre.

    Aimé par 1 personne

  3. Je suis bien d’accord avec toi sur les pubs sur les livres et surtout sur celui-ci.
    J’ai aussi trouvé la série difficile à regarder surtout à la fin, je crois même avoir dit : ça me fait trop mal ou un truc du genre car je ressentais vraiment la douleur de ces femmes en rouge.
    Le livre touche mais différemment, la série à mon sens va plus loin car elle montre le destin d’autres personnages et pas seulement Defred.

    J’aime

  4. Contente que tu aies aimé aussi. En fait, l’accroche marketing fait référence à un évènement qui s’est déroulé aux Etats-Unis, l’année dernière. Des femmes portant le fameux manteau écarlate se sont introduites au Capitole, à Washington, pour manifester contre l’abrogation de l’Obamacare par Trump (et donc de l’accès à l’IVG et à la contraception en règle générale).

    Aimé par 1 personne

Répondre à Célindanaé Annuler la réponse.