Bienvenue à Sturkeyville – Bob Leman

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Bienvenue à Sturkeyville est un recueil de Bob Leman publié grâce à un crowdfunding des éditions Scylla. Il contient 6 nouvelles dont deux inédites en français, se déroulant dans la ville imaginaire de Sturkeyville. Ce recueil permet une mise en lumière de cet écrivain américain, presque inconnu. Il n’a écrit aucun roman, seulement des nouvelles et novellas. Ses textes ont été publiés aux USA entre 1967 et 2002. La revue Fiction a publié quelques uns de ces textes parmi les quinze qu’il a écrit. L’objet livre est vraiment très beau avec des illustrations intérieures très réussies.

J’étais passée totalement à côté de ce financement participatif des éditions Scylla. C’est grâce aux articles des blogopotes que j’ai entendu parler de ce livre et heureusement, sinon je serai passée à côté d’un excellent recueil. Les textes de ce livre sont du genre fantastique horreur. Dans certains, on peut douter parfois de la santé mentale des protagonistes mais dans d’autres, il est évident que l’indicible existe. Avant de parler des textes plus en détail, un mot sur la ville de Sturkeyville. Elle est située quelque part aux pieds des Appalaches. C’est une petite ville américaine rurale qui parait typique au premier regard. Mais à y regarder de plus près, d’étranges événements s’y produisent, des créatures monstrueuses y côtoient ses habitants. C’est un peu une version d’Innsmouth située au pied des montagnes. Petit conseil: il vaut mieux lire les textes dans l’ordre du recueil pour pleinement en profiter. Ce n’est pas l’ordre chronologique de l’écriture des textes mais il a une importance dans l’histoire de la ville.

La Saison du ver: belle entrée en matière pour ce texte qui nous raconte la vie et l’enfance de Harvey Lawson marqué par le destin et par une étrange créature. Les personnages vivent un véritable cauchemar éveillé. Une nouvelle qui fait froid dans le dos, très bien écrite.

  La Quête de Clifford M. : Bob Leman nous propose ici sa version des vampires qui ne ressemblent en rien à la créature que l’on pense connaitre. La version adulte de la créature ressemble aux humains tandis que la version bébé n’a rien d’humain. Ils se nourrissent de sang humain dont ils ont très souvent besoin. Clifford M. est un des leurs mais par un caprice du destin il a été élevé par des humains et ignore tout de ses origines. L’occasion pour l’auteur de s’interroger sur la notion de monstres. Une nouvelle originale avec un personnage principal ambigu et attachant.

Les Créatures du lac : texte raconté à la première personne, ce qui permet à l’auteur d’introduire le doute sur tout ce qui est narré. Caleb, l’oncle du narrateur, lui racontait quand il était enfant des tas d’histoires, dont une sur des monstres qui hantaient le lac de Sturkeyville. Ces récits l’ont particulièrement marqué. Mais, en grandissant, il a quitté la ville et ne croit plus vraiment aux monstres. Caleb a vieilli seul et habite maintenant la maison au bord du lac que l’on dit hantée. Les récits enchâssés de cette nouvelle font mouche ! La tension monte au fur et à mesure que le lecteur apprend de nouvelles informations. Sturkeyville se pare alors de faux airs d’Innsmouth. Une des nouvelles les plus réussies du recueil, un véritable bijou du fantastique mâtiné de folie et d’horreur.

Odila: un nouveau texte raconté à la première personne du singulier, mais où le doute est moins présent. Le narrateur n’habite plus Sturkeyville mais y revient souvent. Il apprend lors d’une de ses visites que son ami d’enfance va se marier, au grand dam de sa mère. Ce n’est pas le mariage qui la dérange, mais bien la fiancée, Odila, une femme de la famille Selkirk. Cette famille habite un hameau à proximité de Sturkeyville depuis de nombreuses années, aux habitants avec une telle réputation que leurs voisins de Sturkeyville font tout pour les éviter. Le texte a par certains côtés des airs de Lovecraft. Une nouvelle efficace mais un tout petit peu en dessous des autres.

Loob: certainement la nouvelle la plus réussie du recueil, un chef d’œuvre du genre. Un récit très bien construit où il est question d’un être à part considéré comme un simple d’esprit et appelé Loob. Il parait sans importance mais va se révéler crucial pour le destin de la ville. L’occasion pour l’auteur de dresser le portrait de la ruralité à l’extrême, d’une ville proche de l’abandon, et qui sombre dans le chaos. Une nouvelle où l’auteur joue avec le lecteur et la réalité.

Viens là où mon amour repose et rêve: la nouvelle la plus courte du livre, mélange à la fois d’horreur et d’amour. Webster Knapp a perdu sa femme et souhaite prendre un nouveau départ en achetant une maison où il va vivre avec sa fille et sa belle-mère. La maison est ancienne mais n’a plus été habitée depuis des années. Un texte qui parle du deuil et de l’obsession en renouvelant le thème de la maison hantée.

Bienvenue à Sturkeyville est ainsi une véritable réussite autant pour les textes que pour le travail éditorial effectué. La traduction est parfaite, l’objet livre très réussi et qui convient particulièrement à l’ambiance des récits. On ne peut que remercier les éditions Scylla pour avoir remis Bob Leman dans la lumière étant donné l’excellente qualité de ces textes.

Autres avis: Lutin 82, RSF Blog, Gromovar, Just a word TmbM Outrelivres, Un papillon dans la lune, Feydrautha, Dragon Galactique

Chronique réalisée dans le cadre d’un Service Presse (merci encore)

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Auteur : Bob Leman

Publication : Éditions de la libraire Scylla

Parution : 1 février 2020

Traduction : Nathalie Serval

Illustration : Stéphane Perger

Illustrations intérieures : Arnaud S. Maniak

Cette chronique fait partie du projet maki

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17 commentaires

  1. Un de mes gros coups de cœur de ce début d’année. Le 3ème en fait, après 7 lectures c’est une bonne moyenne et vu ce qu’il y a dans ma PAL je suis confiant pour la suite 😊.
    Mais revenons à notre mouton (noir). Je ne connaissais pas du tout Bob Leman, comme beaucoup d’ailleurs, et je serais passé à côté sans les bon conseils de la team de la Librairie Critic. Une très belle découverte dans une très belle édition. Je serais assez curieux de lire ses autres textes.

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