La maison hantée, de Shirley Jackson

Après avoir lu le numéro 99 de la revue Bifrost consacrée à Shirley Jackson, j’ai eu envie de lire ses romans. Pour commencer, j’ai choisi son livre le plus connu. La Maison hantée est un roman d’horreur psychologique de Shirley Jackson publié en 1959. Le roman est considéré comme l’une des meilleures histoires de maisons hantées de la littérature. Stephen King qualifie le livre de « meilleur roman fantastique des cent dernières années ». Le tire original du roman est The Haunting of Hill House. La traduction française date de 1979 sous le titre Maison hantée puis il a été réédité sous le titre Hantise en 1999 suite à la sortie du film du même nom. Enfin en 2016, une nouvelle traduction a vu le jour sous le titre La Maison hantée.

Un roman devenu un classique

Dans le sous genre de la maison hantée, le roman de Shirley Jackson fait office de classique. Il a d’ailleurs été adapté plusieurs fois au cinéma puis à la télévision depuis sa parution en 1959. La première fois fut quelques années après sa parution, en 1963 par Robert Wise sous le titre La Maison du diable devenu un classique du cinéma d’épouvante. La seconde fois avec beaucoup moins de brio en 1999 fut signée Jan de Bont sous le titre Hantise. Enfin en 2018, Mike Flanagan signe avec The Haunting of Hill House une superbe adaptation qui diffère assez du texte en original tout en en reprenant des éléments clés.

Le roman contient tous les ingrédients devenus communs dans le genre: une maison immense et isolée remplie de mystères, des rumeurs courant sur la demeure, une histoire sombre avec des morts étranges, des personnages marqués par la vie. Tout débute quand le docteur John Montague, passionné par le paranormal, décide de mener une expérience scientifique. Pour cela, il choisit la demeure de Hill House, un manoir réputé hanté. Il le loue pour l’été et choisit des personnes ayant eu des expériences avec le paranormal pour passer quelques semaines avec lui à Hill House. Parmi toutes les personnes qu’il a contacté, seules deux répondent présentes à l’appel: Eleanor Vance, jeune femme timide qui a passé des années à s’occuper de sa mère malade et Theodora, jeune femme au tempérament bohème et fantasque. Luke Sanderson, le jeune héritier de Hill House sera également présent selon les souhaits de la propriétaire de la demeure.

L’importance du décor

Dès le début du roman, Hill House accapare l’attention du lecteur et le prend très vite dans ses filets. Le docteur Montague raconte assez rapidement l’histoire de la demeure, évoquant plusieurs suicides ou morts violentes. La maison a été construite au XIX par un industriel qui voulait y passer sa vie accompagné de sa famille. Elle est située au milieu des collines (d’où son nom) et possède une allure étrange. Les habitants du village voisin la craignent et ses propriétaires n’y vivent pas. La demeure est nimbée d’une aura aristocratique du fait de sa taille ce qui ajoute une dimension sociale à son isolement géographique. Tout reflète l’inhospitalité des lieux. Le cadre où se trouve la demeure a également son importance, il apparait presque idyllique au premier abord avec un ruisseau proche et les collines. Le décor du roman n’est pas là pour mettre en valeur les personnages mais il devient lui-même le personnage et le thème principal du roman. Les personnages ont leurs fêlures, leurs histoires mais le danger vient de la maison elle-même. Les manifestations surnaturelles apparaissent comme un moyen utilisé par la demeure pour communiquer avec ses occupants. Ces manifestations sont de plusieurs types: bruits dans les murs, variation de température au sein d’une même pièce, des portes qui se ferment toutes seules, des mots écrits sur les murs, ou encore des troubles induits chez les personnes pour les influencer. Le couple de gardiens, les Dudley, qui s’occupent de la maison complète le décor à merveille avec un comportement plus qu’étrange, la femme étant psychorigide et le mari agressif.

Un roman d’horreur psychologique

Les phénomènes surnaturels apparaissent assez vite dans la maison. Cependant, contrairement à ce que l’on pourrait penser au premier abord, la maison n’est pas un lieu où l’on rencontre de l’horreur. On ne voit jamais de monstres ni de revenant. La maison hantée ne provoque pas vraiment de peur panique ni de sueurs froides. Il s’agit beaucoup plus d’horreur psychologiques d’un jeu sur les névroses des protagonistes. La maison joue avec leur santé mentale et surtout avec celle d’Eleanor qui apparait très vite comme liée avec Hill House. La jeune femme qui n’a pas eu une existence facile entre une sœur autoritaire et une mère malade, voit l’invitation du Docteur Montague comme une promesse de libération, de vie nouvelle. Cela explique le fait que ce soit elle la plus touchée par les manifestations surnaturelles de la demeure, et qu’il s’établisse entre elles une relation étrange toute en subtilités.

Eleanor apparait de plus en plus fascinée par la maison, d’autant plus qu’elle éprouve beaucoup de mal à se lier aux autres et qu’elle a une fascination ambigüe à l’égard de Theodora. Shirley Jackson instille peu à peu des éléments troubles menant à une confrontation entre les personnages, ainsi qu’entre les personnages et le manoir. De tout cela, nait une ambiance malsaine, où le lecteur hésite sans cesse entre la folie et le surnaturel. Shirley Jackson prend son temps pour l’installer peu à peu en prenant ses personnages au piège de Hill House, de leurs relations le plus souvent par des suggestions subtiles.

La Maison Hantée de Shirley Jackson est ainsi un roman fondateur du sous genre de la maison hantée. Il pose tous les ingrédients qui font du genre un succès, avec une menace venant des peurs et des névroses intimes des personnages. Shirley Jackson déroule son récit lentement, installant peu à peu le malaise dans l’esprit de son lecteur pour mieux le prendre au piège au sein de Hill House.

Autres avis: Lune, Nébal, Le rêvélecteur, La geekosophe, Symphonie, Le rêvelecteur,

Autrice : Shirley Jackson

Éditeur : Rivages /Noir

Parution:1959, 1979, 2016

Construite par un riche industriel au XIXe siècle, Hill House est une monstruosité architecturale, labyrinthique et ténébreuse, qui n’est plus habitée par ses propriétaires. On la dit hantée. Fasciné par les phénomènes paranormaux, le docteur Montague veut mener une enquête et sélectionne des sujets susceptibles de réagir au surnaturel. C’est ainsi qu’Eleanor arrive à Hill House avec ses compagnons. L’expérience peut commencer, mais derrière les murs biscornus, les fantômes de la maison veillent et les cauchemars se profilent…

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Répondre à Aelinel Ymladris Annuler la réponse.