Sympathies for the devil – Thomas Day

sympathies

Sympathies for the devil est un recueil de six textes de Thomas Day. Une première édition de ce livre dans laquelle il y avait 5 nouvelles est parue en juillet 2000 chez le Bélial. Une nouvelle édition a été publiée en septembre 2004 toujours chez le même éditeur. Entre les deux versions plusieurs changements ont eu lieu: des corrections, une nouvelle (L’hiver commença un 22 novembre) a été enlevée et deux autres (À l’heure du loup et La mécanique des profondeurs) ont été ajoutées. Le tout a dans cette version a un aspect beaucoup plus cohérent aux yeux de son auteur, comme il l’explique dans la préface. Depuis le livre a été réédité en poche en 2012.

La fin de six mondes

La thématique commune aux six textes de ce livre est la fin du monde (c’est de circonstance !?), pas forcément au sens apocalypse pour tous, mais la fin du monde tel que nous le connaissons. Une thématique sombre c’est certain mais qui permet de nous questionner sur le genre humain et qui offre une grande cohésion au recueil. La fin des mondes a plusieurs causes mais la Nature et l’action de l’homme sur l’environnement se retrouvent dans plusieurs textes.

Dans Une forêt de cendres, le mal est apparu et détruit quasiment tout sur son passage. On ne connait pas vraiment l’origine de ce mal mais il semble lié à la Nature. Le personnage principal, Paul of Perth, duc du Dragonshire, combat ce cercle de ténèbres. La Reine requiert sa présence à Londres pour une mission de la plus haute importance. Le personnage principal est tueur implacable aussi horrible intérieurement que extérieurement, frappé par une maladie. C’est un personnage très complexe, effrayant dans un monde qui l’est également. La fin de la nouvelle contrebalance le tout. Un très bon texte, remarquablement écrit.

À l’heure du loup présente un monde désolé où les pluies acides ont causé des désastres importants. Il reste très peu d’hommes sur Terre, la nature s’est transformée. Le texte est emprunt d’une certaine poésie mais est un peu trop court pour réellement s’attacher aux personnages.

La mécanique des profondeurs est un texte où le décor a une grande importance. Il se déroule à Amsterdam qui a presque été totalement immergée par la montée des eaux. L’héroïne est une mutante que son environnement a transformé. La ville est cernée par des requins blancs qui ne sont pas forcément les plus grands dangers de cette cité sous les eaux.

Après les causes écologiques, c’est le trop plein d’informations de notre monde moderne qui cause le désastre dans L’Erreur. Le texte est très sombre et très noir parfois, à la limite du soutenable. La narration est parfois alambiquée et le texte est difficile à lire. Le monde décrit est profondément violent, la violence est au centre de la nouvelle. Un texte d’une noirceur extrême mais qui montre bien de quoi l’homme est capable.

Dans La Notion de génocide nécessaire, ce n’est pas vraiment la fin du monde qui est contée, mais la fin du monde des nomades avec de profonds changements dus à l’arrivée d’extra-terrestres sur Terre. Ceux-ci offrent aux humains des présents technologiques mais en échange veulent pouvoir localiser tous les peuples grâce à une puce implantée dans le corps. L’ONU envoie un émissaire en Mongolie pour rencontrer le chef du peuple nomade mongole afin de les convaincre des biens fondés de l’implantation de la puce. Un texte parlant de liberté, de grands espaces, des contraintes de la vie moderne, des choix de vie, surtout un texte d’une grande humanité et un des meilleurs de Thomas Day.

Démon aux yeux de lumière la dernière nouvelle du recueil tranche franchement avec les autres à la fois par sa tonalité, son second degré et la cause de la fin du monde due à la colère des dieux, enfin surtout d’un seul, Loki, le dieu de la mythologie nordique. Loki, le démon aux yeux de lumière, a provoqué le Ragnarok qui a ravagé le monde avec d’énormes failles. Mais un monde complètement désolé n’offre pas beaucoup de divertissements pour un dieu tel que Loki. Thomas Day fait preuve dans ce texte d’un second degré vraiment très plaisant à lire. Un très bon texte pour clôturer ce livre.

Un auteur multi facettes

Ce qui frappe dans ce recueil est le fait que les nouvelles sont très différentes même si elles sont liées par une thématique commune. À la terrible noirceur de texte comme L’Erreur répond l’humanisme de La Notion de génocide nécessaire. Les deux textes se mettent ainsi en valeur l’un l’autre, en explorant deux facettes de l’humanité. Thomas Day excelle dans La Notion de génocide nécessaire et provoque le dégoût dans L’Erreur. Cela montre le talent de l’auteur et sa versatilité. Démon aux yeux de lumière montre aussi les différentes facettes dont est capable l’auteur avec un texte plein d’humour et de second degré, un texte plein de références avec un personnage principal fabuleux.

Cependant, il y a un point commun dans tous ces textes, on y retrouve le style direct, percutant de l’auteur. Il entre dans le vif du sujet de manière incisive et efficace, n’hésitant pas à se montrer cru avec des scènes très violentes ou de sexes explicites. La violence est le thème de prédilection de l’auteur et cela se voit dans chacune des nouvelles. Pourtant, il y a une forme de poésie et de douceur aussi dans ce livre, présentes par petites touches.

Thomas Day fait aussi preuve d’une imagination débordante dans chacun des textes, offrant des décors évocateurs et chaque fois différent. Le Londres apocalyptique ou Amsterdam noyé par les eaux, aux forêts où les loups sont rois, aux vastes plaines de la Mongolie, autant de paysages différents recelant de beautés ou d’horreurs. Autre caractéristique de ces nouvelles: des personnages torturés, marqués par leur passé, hésitant sur les choix à mener, mais toujours des personnages marquants. Enfin les nouvelles de ce livre fourmillent de références cinématographiques et musicales qui apportent une touche de fun bienvenue.

Sympathies for the devil est ainsi un remarquable recueil qui montre tout le talent de Thomas Day, capable de faire passer le lecteur par de nombreuses émotions. La thématique de la fin d’un monde est commune à tous les textes. Sur les 6 textes, trois sont de véritables réussites, chacun pour des raisons différentes.

Autres avis: Boudicca,

loki

Auteur : Thomas Day

Éditeur : Le Belial / Folio SF en poche

Date de publication : 2004 (2012 pour la version poche)

Sous vos yeux, six mondes vont prendre fin : le nôtre bien sûr, déserté par l’humanité, rendu aux hommes-arbres et aux loups ; celui des douze dragons renversés, étouffé par l’information continue ; celui des nomades mongols condamnés à la sédentarisation ; Amsterdam sous les eaux, hanté par le plus étrange des tueurs en série ; la Terre brûlée de Loki, grand farceur et agent provocateur un brin excessif. Six mondes vont prendre fin et tous ne renaîtront pas.

Cette chronique fait partie du projet maki

IMG_20191223_114201

10 commentaires

  1. Ça a l’air d’être du pur Thomas Day, ça donne envie. Tiens, question à deux sous : entre « 7 secondes pour devenir un aigle » et celui-ci, lequel est pour toi le meilleur recueil ?
    (Je n’avais jamais vu la couverture FolioSF, wouah. *_*)

    Aimé par 1 personne

Laisser un commentaire