Terra Ignota livre 1: Trop semblable à l’éclair – Ada Palmer

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Trop Semblable à l’Éclair, premier roman d’Ada Palmer arrive en France auréolé d’une belle réputation. Le roman a reçu les faveurs des critiques autant que par les écrivains. Jo Walton ou encore Robert Charles Wilson ont encensé le livre. Le roman a été nommée au prix Hugo en 2017, prix finalement remporté par La porte de cristal de N.K.Jemisin. Les éditions Le Bélial se sont chargées de l’édition française, la traduction étant effectuée par Michelle Charrier. Ada Palmer est historienne et enseignante à l’université de Chicago. La série « Terra Ignota » est une quadrilogie, les tomes allant 2 par 2. Le tome suivant, Sept Redditions, est déjà prévu en France pour l’année prochaine.

Trop Semblable à l’Éclair est un roman particulier, où il est difficile d’entrer pour plusieurs raisons, notamment du fait du mode de narration. Cependant, c’est un roman d’une richesse et d’une complexité énormes, tant au niveau de l’univers qu’au niveau des idées. C’est un roman où il faut parfois s’accrocher, le style et les tournures étant parfois ardus mais je comprends tout à fait les raisons de son succès, le roman marque vraiment les esprits. C’est pour ces raisons un roman qui ne plaira pas à tout le monde, autant être prévenu.

Le roman se situe en 2454 dans un monde que l’on peut qualifier d’utopique. Trois cent ans auparavant, des événements meurtriers ont totalement modifié la société. Les nations ont disparu et n’existent plus que dans les mémoires. Les 10 milliards d’humains sont dorénavant regroupés dans des Ruches. Ces Ruches sont des rassemblements de personnes en fonction de leurs convictions, centres d’intérêts, points communs….On peut changer de Ruches, le plus important étant la liberté. Les gens sont libres d’habiter avec qui ils le désirent, de fonder leur famille comme ils l’entendent. Les genres n’ont aucune importance, ne sont jamais mentionnés même niés. Après tout, c’est une manière de garantir une liberté totale à chacun des plus efficaces. Pour parler d’une personne, on emploie le « on » au singulier comme au pluriel « ons » qui permet ainsi d’être le plus neutre possible. Il y a 7 Ruches, chacune ayant son propre système de loi, ses affinités politiques et une manière de les distinguer.

Le monde semble utopique car personne ne manque de rien, les famines n’existent plus, les ressources sont très nombreuses, on peut consacrer sa vie à ses loisirs. On ne sait pas vraiment comment on en est arrivé à un tel monde, ni ce qu’il en est du réchauffement climatique. Mais il reste 3 tomes, les réponses viendront peut-être par la suite. La religion n’est plus présente, mais la spiritualité oui. Certaines personnes sont des sensayers, ils ont pour but d’aider les autres sur la route de la spiritualité en menant des entretiens privés sur des sujets aussi vastes que la mort, les croyances.

L’intrigue principale du roman est de raconter comment ce système si parfait en apparence va être mis à mal. Deux grains de sable qui vont contribuer à cette situation vont apparaître dès le début du récit . Le premier est le vol d’un document fondamental : la liste des dix principaux influenceurs mondiaux publiée chaque année, et qui permet d’établir les rapports de force entre les Ruches. Le second est un enfant très spécial, doté de pouvoirs uniques et presque incompréhensibles. Ces deux éléments sont au cœur du roman.

Le roman est raconté par un narrateur et personnage très spécial : Mycroft Canner. C’est un condamné au service public à perpétuité. La raison de cette condamnation est simple, il a commis des crimes atroces et pour cela est mis au ban de la société. Les personnes comme lui doivent servir les autres, reçoivent des repas en échange mais sont privés de leur liberté et de leurs droits. Mais Mycroft n’est pas non plus comme les autres condamnés, il semble jouir de relations particulières avec certaines personnes et avoir la confiance de dirigeants. On lui a d’ailleurs confié l’enquête pour savoir qui est l’auteur du vol de la liste des dix principaux influenceurs. Mycroft est un personnage trouble, mystérieux. On ne sait pas pourquoi il a été condamné avant la moitié du roman. C’est un personnage très bien construit et complexe. Les autres protagonistes du roman sont dans le même cas, j’ai beaucoup apprécié notamment l’enfant pour tous les questionnements qu’il se pose.

L’autre fait notable du récit est la manière dont il est narré par Mycroft. En effet, Mycroft parle souvent directement à son lecteur, quelqu’un du futur et celui-ci lui répond. Cela surprend franchement au départ, surtout qu’on ne sait rien sur ce fameux lecteur. Ada Palmer est une historienne et a une grande connaissance du 18ème siècle. Ce savoir transparaît tout au long du roman. Notamment dans ce procédé de narration, où elle brise le quatrième mur. Le concept de quatrième mur fut introduit par Denis Diderot pour le théâtre en parlant des comédiens sur scène qui s’adressent directement au public. Ses références historiques sont présentes tout au long du roman. En effet, les habitants de ce monde sont fascinés par tout ce qui a trait au passé et essayent d’en reproduire certains aspects. La Ruche des Masons nomme son dirigeant Caesar par exemple. D’autres Ruches préfèrent le siècle des lumières comme référence.

Trop Semblable à l’Éclair est donc un roman surprenant à plus d’un titre : par son univers, son personnage principal, son style et son mode de narration. Il ne pourra pas plaire à tous. Mais on ne peut nier la très grande qualité de la construction de l’univers et du roman en lui-même. La traduction de Michelle Charrier est également d’une très grande qualité. De plus, ce roman n’est que le premier tome de la série et une mise en place de l’univers, des personnages. Le second tome apportera certainement son lot de réponses. C’est un roman long, complexe mais d’une richesse extraordinaire et qui nous questionne sur beaucoup d’éléments.

Autres avis: Just a word, Lianne, L’épaule d’Orion, Blackwolf, Cédric Jeanneret , Gromovar

Chronique réalisée dans le cadre d’un Service Presse (merci encore)

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Autrice: Ada Palmer

Éditeur : Le Bélial’

Parution : 24/10/2019

Année 2454. Trois siècles après des évènements meurtriers ayant remodelé la société, les concepts d’État-nation et de religion organisée ont disparu. Dix milliards d’êtres humains se répartissent ainsi par affinités, au sein de sept Ruches aux ambitions distinctes. Paix, loisirs, prospérité et abondance définissent ce XXVe siècle radieux aux atours d’utopie. Qui repose toutefois sur un équilibre fragile. Et Mycroft Canner le sait mieux que personne… Coupable de crimes atroces, condamné à une servitude perpétuelle mais confident des puissants, il lui faut enquêter sur le vol d’un document crucial : la liste des dix principaux influenceurs mondiaux, dont la publication annuelle ajuste les rapports de force entre les Ruches. Surtout, Mycroft protège un secret propre à tout ébranler : un garçonnet aux pouvoirs uniques, quasi divins. Or, dans un monde ayant banni l’idée même de Dieu, comment accepter la survenue d’un miracle ?

29 commentaires

    • Je pense que lire les 2 à la suite est une bonne idée parce que plusieurs points ne sont pas résolus et on a envie de savoir le fin mot de l’histoire. Ce qui fait pour répondre à ta seconde question que ma réponse est oui et non parce que j’aurai aimé avoir la suite disponible. Le style n’est pas ampoulé, c’est juste qu’il faut se faire aux « ons » et à l’emploi du neutre constant, aux changements de ton.

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