L’épée brisée-Poul Anderson

épéebriséeVoici l’histoire d’une épée qu’on dit capable de trancher jusqu’aux racines mêmes d’Yggdrasil, l’Arbre du Monde. Une épée dont on dit qu’elle fut brisée par Thor en personne. Maléfique. Forgée dans le Jotunheim par le géant Bölverk, et appelée à l’être à nouveau. Une épée qui, une fois dégainée, ne peut regagner son fourreau sans avoir tué. Voici l’histoire d’une vengeance porteuse de guerre par-delà le territoire des hommes. Un récit d’amours incestueuses. De haine. De mort. Une histoire de destinées inscrites dans les runes sanglantes martelées par les dieux, chuchotées par les Nornes. Une histoire de passions. Une histoire de vie…

Auteur: Poul Anderson

Traducteur: Jean-Daniel BRÈQUE

Édition: Le Bélial                     Parution : 14 novembre 2014/1954 États-Unis

L’auteur : Né en 1926 en Pennsylvanie, Poul Anderson a rédigé au total une centaine de romans et de recueils de nouvelles, dont une bonne part demeure pour l’heure encore inédite en français. Ses textes relèvent autant de la science-fiction que de la fantasy,  voire des romans policiers ou historiques. S’il est considéré outre-Atlantique comme un maître incontournable, Poul Anderson a longtemps été boudé par la critique en France, du fait de ses prises de position en faveur de la guerre du Vietnam. Depuis quelques années, Le Bélial’ a entrepris de rééditer ses textes et de réhabiliter cet auteur — tout de même l’un des grands noms de l’Âge d’Or américain, lauréat de rien de moins que trois prix Nebula et de sept prix Hugo. (source site Le Bélial)

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Interlude musical: King Eluveitie (aussi rythmé que le roman)

L’épée brisée a été écrit en 1954, année de la parution de La communauté de l’anneau de Tolkien qui a eu le succès que l’on sait. L’épée brisée a aussi remporté un grand succès aux États-Unis mais ne fut traduit qu’en 2014, à l’excellente initiative des éditeurs du Bélial. Le roman a plusieurs points communs avec Le seigneur des anneaux mais il s’en éloigne aussi grandement par de nombreux points en lorgnant vers la Dark Fantasy.

L’épée brisée est inspirée des légendes scandinaves et on y trouve un objet de pouvoir très puissant, voilà pour les points communs avec la trilogie de Tolkien. Mais l’œuvre de Tolkien est une trilogie qui prend son temps pour raconter une histoire, là où Poul Anderson lui narre une histoire sur un rythme effréné. Enfin, la trilogie de Tolkien a un côté plus lumineux en quelque sorte, avec de l’espoir, des hobbits heureux de vivre, et peu de morts dans les personnages principaux. Poul Anderson se veut plus sombre en montrant la réalité de la nature humaine avec ce qu’elle comporte de violent et de macabre. Cependant, les deux œuvres sont d’une grande valeur et là s’arrête la comparaison.

La fameuse épée qui donne son titre au roman n’apparait qu’assez tardivement dans le roman, c’est d’ailleurs assez paradoxal par rapport au résumé du quatrième de couverture. Le point de départ du récit est une vengeance, celle d’une femme un peu sorcière sur les bords contre un homme, un viking venu conquérir ses terres et tuer sa famille. Sa vengeance sera implacable, cruelle, et aura des conséquences tragiques pour beaucoup. Le roman est surtout centré sur la guerre que se mènent les elfes et les trolls et à laquelle vont être mêler les principaux personnages.

Les elfes ne correspondent pas vraiment à ceux de l’univers de Tolkien, ils ont un côté moins humains. Les trolls sont les plus beaux et les meilleurs, ah non c’est pas ça, bon ce sont des trolls quoi, ils ne sont pas présentés sous leur meilleur jour. Leur conflit est le moins que l’on puisse dire épique. Les combats sont très nombreux et impressionnants, ça castagne sec et les morts se comptent par centaines.

L’univers du roman est lié aux légendes nordiques et celtiques, on trouve beaucoup de référence à celles-ci par la nature des créatures présentes surtout, mais aussi par les lieux. Le monde ressemble à l’Europe du début du deuxième millénaire avec les vikings et leurs conquêtes. Cependant, il existe un autre monde, caché aux humains, où vivent des créatures un peu plus étranges comme des trolls, des nains, des géants. Les trolls vivent au Trollheim et les elfes dans l’Alfheim. Vous l’aurez compris, le surnaturel est très présent dans le roman, plus que les vikings. Par contre leurs légendes sont beaucoup exploitées dans ce livre. Cette mythologie est très riche mais a aussi un côté sombre qui transparait très bien dans le récit. La violence et la fureur sont ainsi omniprésentes. Le mélange d’histoire et de mythologie fonctionne très bien pour nous offrir un univers très dense et fascinant.

Le récit a un aspect saga marqué, ce qui se ressent au niveau des personnages. Les principaux protagonistes sont ceux d’une famille danoise du Danelaw (partie du Nord et de l’Est de l’Angleterre où s’appliquait la loi des Danois et qui supplantait celle des Anglo-saxons). Cette famille est constitué d’un père viking, descendant de… Ragnar Lodbrok par une concubine et d’une mère anglaise et chrétienne. Ragnar Lodbrok est un peu le roi Arthur des vikings, il régna à une époque indéterminée entre 750 et 850. Le premier enfant de ce couple fera l’objet d’un échange par les elfes et ainsi Skafloc, l’humain et véritable enfant du couple grandira chez les elfes tandis qu’il sera remplacé dans sa famille par Valgard, un changelin avec du sang troll. Le couple aura d’autres enfants qui seront impactés par cet échange. Les personnages sont parfaitement ancrés dans les légendes et le côté saga, mais ils sont bien construits avec une certaine complexité.

Un autre aspect important du roman est la religion et la survie des anciennes croyances par rapport à la religion catholique en pleine expansion. Les dieux vikings conspirent dans ce but, pour continuer à exister. Les humains sous couvert de religion condamnent tout ce qu’ils estiment être contre nature. Ce conflit apparait ouvertement dans l’histoire entre Skafloc et Freda. 

Le roman offre un récit d’une très grande densité et une fantasy classique qui joue sur la violence et s’inspire des légendes scandinaves. Les manipulations, vengeances, trahisons et morts sont très nombreuses pour nous offrir un récit sans temps mort. L’épée brisée est un roman épique et entrainant  dont je conseille fortement la lecture. À souligner également la très bonne traduction de Jean-Daniel BRÈQUE.

Célindanaé

Autres avis: Apophis, Lorhkan, Dionysos, Lhisbei, BlackWolf, Elbakin

Cette chronique fait partie du  challenge littérature de l’imaginaire

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et du Challenge Summer Short Stories of SFFF  de Xapur

Challenge Summer Short Stories of SFFF - saison 3

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34 commentaires

  1. Souvent comparé avec « Le seigneur des anneaux » alors qu’effectivement les deux récits son bien différents.
    Dans « L’épée brisée » on nage en pleine dark fantasy scandinave, avec de la noirceur, des morts, etc… A la limite, parce que « Le seigneur des anneaux » est un peu trop gentillet par rapport à ce récit, si on voulait vraiment faire un rapprochement avec les récits de Tolkien (qui s’est lui aussi très inspiré des légendes scandinaves), on devrait plutôt parler de « Les enfants de Hurin », beaucoup plus noir avec des thèmes assez proches (trahison, vengeance, inceste…).
    En tout cas, « L’épée brisée » est un excellent roman, qu’il était plus que temps de traduire (mais le temps a quand même un peu fait son oeuvre, et au regard de ce qui se fait aujourd’hui, je ne peux plus lui accorder le statut de chef d’oeuvre, statut qu’il méritait amplement à son époque).

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  2. Je ne peux qu’aprouver une telle critique sur un des livres les plus intenses de mon auteur favori.
    Je ne trouve pas SdA comparable à L’Epée Brisée, bien trop noir pour cela.

    Les playmobils, c’est trop gentils pour un tel roman, et puis, ils sont accompagnés par un…. troll ???lll un seul dans le coin ?

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  3. J’avais bien aimé ce récit, j’ai juste trouvé dommage qu’on force la comparaison avec le Seigneur des Anneaux. Déjà parce que ce roman est plus proche des Enfants de Hurin que du SdA, et aussi parce que ça oriente immédiatement la lecture. A bas les préfaces 😀

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